La mobilité temporaire des jeunes Suisses : sélectivité, motivations et freins
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Serval ID
serval:BIB_4A68D4B5026D
Type
PhD thesis: a PhD thesis.
Collection
Publications
Institution
Title
La mobilité temporaire des jeunes Suisses : sélectivité, motivations et freins
Director(s)
Rérat Patrick
Institution details
Université de Lausanne, Faculté des géosciences et de l'environnement
Publication state
Accepted
Issued date
2021
Language
french
Abstract
La mobilité temporaire regroupe des séjours éducationnels, professionnels ou culturels, réalisés dans un pays différent ou dans une autre région linguistique, avec un retour défini dès le départ et un objectif autre que touristique. Ce type de mobilité revêt une signification particulière pour les jeunes et est vue par certaines populations comme un rite de transition à l’âge adulte. Toutefois, la diversité des motifs et des destinations rend l’obtention de données fiables sur le sujet difficile et l’analyse de ce phénomène se concentre souvent sur des populations spécifiques (généralement des étudiants universitaires ayant expérimenté la mobilité). La thèse comble cette lacune en analysant les expériences et les intentions de (non-
)mobilité temporaire à travers une cohorte entière de jeunes hommes suisses âgés de 18 à 20 ans ainsi que sur un échantillon complémentaire de plus de 2000 jeunes femmes suisses. Les données utilisées proviennent de l’édition 2016/2017 des enquêtes fédérales auprès de la jeunesse (enquêtes ch-x) portant sur les parcours de vie et les expériences de mobilité. La thèse comporte quatre articles, traitant chacun d’une question de recherche propre à la mobilité temporaire.
La mobilité temporaire est un phénomène sélectif. Les jeunes provenant d’un milieu favorisé ont une plus grande probabilité de devenir mobiles. Mais d’autres facteurs ont une influence sur la mobilité temporaire, tels que le genre, la constellation familiale, et l’éducation du jeune. L’analyse démontre aussi l’accumulation d’un capital de mobilité à travers le parcours de vie, formé au cours des diverses expériences de mobilités (déménagements, vacances, etc.) et facilitant de futurs séjours. Enfin, les minorités linguistiques ont une incitation plus forte à partir en séjour.
Les motivations à partir en séjour relèvent de trois types et dépendent du parcours de vie ainsi que du capital de mobilité accumulé. L’analyse met en évidence trois groupes de jeunes : les Curieux possèdent un fort capital de mobilité et partent plus souvent pour des raisons hédonistes (découvrir une culture, faire de nouvelles rencontres, etc.) ; les Professionnels cherchent à accumuler du capital de mobilité et répondent à des critères utilitaires (employabilité, connaissances linguistiques) ; enfin, les Pragmatiques possèdent moins de capital de mobilité et profitent de temps à disposition dans une période de transition pour partir dans une logique opportuniste.
La sélectivité de la mobilité temporaire en fonction du genre reste valable toute chose égale par ailleurs dans les analyses, les femmes sont plus mobiles que les hommes. L’analyse
des motivations des hommes et des femmes à entreprendre une mobilité temporaire s’appuie en outre sur des entretiens qualitatifs avec des étudiantes et étudiants. Deux axes d’interprétation expliquent la différence de mobilité : les aspirations professionnelles et la notion d’indépendance acquise à travers le voyage. Les hommes partent plus souvent pour des raisons utilitaires, et tendent à limiter les efforts pour partir en séjour. Les femmes valorisent l’expérience en elle-même et mettent davantage en avant des motivations hédonistes. Elles mentionnent aussi plus souvent l’importance d’acquérir de l’indépendance lors d’un séjour.
L’analyse se concentre ensuite sur les jeunes non mobiles, et les raisons de leur non- mobilité. Le concept de la motilité (le potentiel de mobilité) est utilisé afin d’appréhender les différentes facettes de la non-mobilité, en classant les freins à travers trois composantes : l’accès (« pouvoir » partir), les compétences (« savoir » partir) et l’appropriation (« vouloir » partir). Quatre groupes de jeunes sont identifiés, avec différentes motilités. Les jeunes du groupe des contraints font face à de nombreux freins concernant leur mobilité, liés à leur classe sociale. Le deuxième groupe représente les jeunes en difficulté financière, qui sont fortement intéressés par la mobilité temporaire, mais font face à un manque de ressources financières. Le troisième groupe des ancrés privilégie son ancrage local et ses liens sociaux alors que le quatrième groupe, nommé les non-mobiles satisfaits, choisit la non-mobilité, et ne possède pas de contraintes particulières. L’analyse permet ainsi de classer ces quatre groupes dans un continuum entre ‘stuckness’ (contraints à la non-mobilité) et ‘stillness’ (volonté d’être non- mobiles).
Ces quatre articles permettent d’obtenir une vision large de la mobilité temporaire des jeunes adultes, et offrent de nouvelles perspectives théoriques et implications politiques. L’encouragement pour ce type de séjour, déjà soutenu politiquement en Suisse, passe par la réduction des barrières d’accès (temporelles ou financières), et des aides pour les jeunes possédant un capital de mobilité limité, une première expérience de mobilité temporaire ouvrant généralement la voie à d’autres. Enfin, tout en encourageant la réduction des barrières d’accès, il est important de prendre en compte la partie ne souhaitant pas devenir mobile de la population. Au niveau théorique, l’importance du capital de mobilité comme interprétation des différences d’accès au phénomène ainsi que de différenciation des motivations offre des pistes d’approfondissement, de même que l’étude de l’influence du genre sur les motivations à entreprendre une mobilité temporaire. Des d’études comparatives permettraient de confirmer les apports empiriques de cette thèse dans des contextes différents (pays non plurilingues ou économies moins globalisées).
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Temporary mobility includes educational, professional or cultural stays in a different country or in another linguistic region, with a return defined from the start and a purpose other than tourism. Temporary mobility has a particular meaning for some populations of young adults and is seen as a rite of transition to adulthood. However, the diversity of motives and destinations complicates the collection of reliable data on the subject and the analysis of this phenomenon is often focused on specific populations (usually university students). This thesis fills this gap by analysing the experiences and intentions of temporary (non-)mobility through an entire cohort of young Swiss men aged 18 to 20 and a complementary sample of more than 2000 young Swiss women. The data used come from the 2016/2017 edition of the Swiss Federal Surveys of Adolescents (ch-x surveys) covering the theme of life course and mobility experiences. The thesis consists of four articles, each dealing with a specific research question about temporary mobility and shedding light on the selectivity of the phenomenon, the motivations of mobile young adults, the influence of the gender on selectivity, and the reasons for non-mobility.
Temporary mobility is a selective process. Young adults from an advantaged background have a higher probability of becoming mobile. However, other factors influence temporary mobility, such as gender, familial constellation, and the young adult's education. The analysis also demonstrates the accumulation of a mobility capital through the life course, built up over various experiences of mobility (moving, vacations, etc.) and facilitating future stays. Finally, linguistic minorities have a stronger incentive to engage in temporary mobility.
Three types of motivations for undertaking a stay are identified and depend on the life course and the accumulated mobility capital. Similarly, the benefits of stays depend on the initial motivations. The analysis highlights three groups of young adults: the Curious have a high level of mobility capital and leave for hedonistic reasons (discovering a culture, meeting new people, etc.); the Professionals seek to accumulate mobility capital and respond to utilitarian criteria (employability, language skills); finally, the Pragmatic have less mobility capital and take advantage of the time available during a period of transition to travel for an opportunistic reason.
Temporary mobility depends on gender. Women are more mobile than men all things being equal. The analysis of men's and women's motivations to undertake a temporary mobility is, furthermore, based on qualitative interviews with female and male students. The variation
of mobility can be explained by two main factors which are professional aspirations and the independence acquired through the stay. Men leave more often for utilitarian reasons and tend to limit the efforts to travel. Women value the experience itself and put forward more hedonistic motivations. They also more often mention the importance of gaining independence from a temporary mobility.
The analysis then focuses on non-mobile young adults and the reasons for their non- mobility. The concept of motility (the potential for mobility) is used to capture the different dimensions of non-mobility, by classifying the barriers through three components: access ("being able" to leave), skills ("knowing" how to leave) and appropriation ("wanting" to leave). Four groups of young adults are identified, with different motility. The first group of young people face many constraints regarding their mobility, driven by their social class. The second group is strongly interested in mobility but faces a lack of financial resources. The third group values its local anchorage and its social ties, while the fourth group chooses non-mobility, with no particular constraints. The analysis allows us to classify these four groups on a continuum between 'stuckness' (unable to move) and 'stillness' (no desire to move).
These four articles of the thesis provide a broad view of young adults' temporary mobility and offer new theoretical perspectives and policy implications. The encouragement of this type of stay involves the reduction of temporal or financial barriers of access and the support of young adults with limited mobility capital. A first experience of temporary mobility generally leads the way for another one. Finally, while encouraging the reduction of access barriers, it is important to take into account the non-mobile part of the population that does not want to become mobile. From a theoretical point of view, the importance of the mobility capital and the influence of gender concerning the selectivity of temporary mobility and the motivations offer possibilities for further research. Comparative studies could confirm the empirical contributions of this thesis in different contexts (such as non-plurilingual countries or less globalised economies).
)mobilité temporaire à travers une cohorte entière de jeunes hommes suisses âgés de 18 à 20 ans ainsi que sur un échantillon complémentaire de plus de 2000 jeunes femmes suisses. Les données utilisées proviennent de l’édition 2016/2017 des enquêtes fédérales auprès de la jeunesse (enquêtes ch-x) portant sur les parcours de vie et les expériences de mobilité. La thèse comporte quatre articles, traitant chacun d’une question de recherche propre à la mobilité temporaire.
La mobilité temporaire est un phénomène sélectif. Les jeunes provenant d’un milieu favorisé ont une plus grande probabilité de devenir mobiles. Mais d’autres facteurs ont une influence sur la mobilité temporaire, tels que le genre, la constellation familiale, et l’éducation du jeune. L’analyse démontre aussi l’accumulation d’un capital de mobilité à travers le parcours de vie, formé au cours des diverses expériences de mobilités (déménagements, vacances, etc.) et facilitant de futurs séjours. Enfin, les minorités linguistiques ont une incitation plus forte à partir en séjour.
Les motivations à partir en séjour relèvent de trois types et dépendent du parcours de vie ainsi que du capital de mobilité accumulé. L’analyse met en évidence trois groupes de jeunes : les Curieux possèdent un fort capital de mobilité et partent plus souvent pour des raisons hédonistes (découvrir une culture, faire de nouvelles rencontres, etc.) ; les Professionnels cherchent à accumuler du capital de mobilité et répondent à des critères utilitaires (employabilité, connaissances linguistiques) ; enfin, les Pragmatiques possèdent moins de capital de mobilité et profitent de temps à disposition dans une période de transition pour partir dans une logique opportuniste.
La sélectivité de la mobilité temporaire en fonction du genre reste valable toute chose égale par ailleurs dans les analyses, les femmes sont plus mobiles que les hommes. L’analyse
des motivations des hommes et des femmes à entreprendre une mobilité temporaire s’appuie en outre sur des entretiens qualitatifs avec des étudiantes et étudiants. Deux axes d’interprétation expliquent la différence de mobilité : les aspirations professionnelles et la notion d’indépendance acquise à travers le voyage. Les hommes partent plus souvent pour des raisons utilitaires, et tendent à limiter les efforts pour partir en séjour. Les femmes valorisent l’expérience en elle-même et mettent davantage en avant des motivations hédonistes. Elles mentionnent aussi plus souvent l’importance d’acquérir de l’indépendance lors d’un séjour.
L’analyse se concentre ensuite sur les jeunes non mobiles, et les raisons de leur non- mobilité. Le concept de la motilité (le potentiel de mobilité) est utilisé afin d’appréhender les différentes facettes de la non-mobilité, en classant les freins à travers trois composantes : l’accès (« pouvoir » partir), les compétences (« savoir » partir) et l’appropriation (« vouloir » partir). Quatre groupes de jeunes sont identifiés, avec différentes motilités. Les jeunes du groupe des contraints font face à de nombreux freins concernant leur mobilité, liés à leur classe sociale. Le deuxième groupe représente les jeunes en difficulté financière, qui sont fortement intéressés par la mobilité temporaire, mais font face à un manque de ressources financières. Le troisième groupe des ancrés privilégie son ancrage local et ses liens sociaux alors que le quatrième groupe, nommé les non-mobiles satisfaits, choisit la non-mobilité, et ne possède pas de contraintes particulières. L’analyse permet ainsi de classer ces quatre groupes dans un continuum entre ‘stuckness’ (contraints à la non-mobilité) et ‘stillness’ (volonté d’être non- mobiles).
Ces quatre articles permettent d’obtenir une vision large de la mobilité temporaire des jeunes adultes, et offrent de nouvelles perspectives théoriques et implications politiques. L’encouragement pour ce type de séjour, déjà soutenu politiquement en Suisse, passe par la réduction des barrières d’accès (temporelles ou financières), et des aides pour les jeunes possédant un capital de mobilité limité, une première expérience de mobilité temporaire ouvrant généralement la voie à d’autres. Enfin, tout en encourageant la réduction des barrières d’accès, il est important de prendre en compte la partie ne souhaitant pas devenir mobile de la population. Au niveau théorique, l’importance du capital de mobilité comme interprétation des différences d’accès au phénomène ainsi que de différenciation des motivations offre des pistes d’approfondissement, de même que l’étude de l’influence du genre sur les motivations à entreprendre une mobilité temporaire. Des d’études comparatives permettraient de confirmer les apports empiriques de cette thèse dans des contextes différents (pays non plurilingues ou économies moins globalisées).
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Temporary mobility includes educational, professional or cultural stays in a different country or in another linguistic region, with a return defined from the start and a purpose other than tourism. Temporary mobility has a particular meaning for some populations of young adults and is seen as a rite of transition to adulthood. However, the diversity of motives and destinations complicates the collection of reliable data on the subject and the analysis of this phenomenon is often focused on specific populations (usually university students). This thesis fills this gap by analysing the experiences and intentions of temporary (non-)mobility through an entire cohort of young Swiss men aged 18 to 20 and a complementary sample of more than 2000 young Swiss women. The data used come from the 2016/2017 edition of the Swiss Federal Surveys of Adolescents (ch-x surveys) covering the theme of life course and mobility experiences. The thesis consists of four articles, each dealing with a specific research question about temporary mobility and shedding light on the selectivity of the phenomenon, the motivations of mobile young adults, the influence of the gender on selectivity, and the reasons for non-mobility.
Temporary mobility is a selective process. Young adults from an advantaged background have a higher probability of becoming mobile. However, other factors influence temporary mobility, such as gender, familial constellation, and the young adult's education. The analysis also demonstrates the accumulation of a mobility capital through the life course, built up over various experiences of mobility (moving, vacations, etc.) and facilitating future stays. Finally, linguistic minorities have a stronger incentive to engage in temporary mobility.
Three types of motivations for undertaking a stay are identified and depend on the life course and the accumulated mobility capital. Similarly, the benefits of stays depend on the initial motivations. The analysis highlights three groups of young adults: the Curious have a high level of mobility capital and leave for hedonistic reasons (discovering a culture, meeting new people, etc.); the Professionals seek to accumulate mobility capital and respond to utilitarian criteria (employability, language skills); finally, the Pragmatic have less mobility capital and take advantage of the time available during a period of transition to travel for an opportunistic reason.
Temporary mobility depends on gender. Women are more mobile than men all things being equal. The analysis of men's and women's motivations to undertake a temporary mobility is, furthermore, based on qualitative interviews with female and male students. The variation
of mobility can be explained by two main factors which are professional aspirations and the independence acquired through the stay. Men leave more often for utilitarian reasons and tend to limit the efforts to travel. Women value the experience itself and put forward more hedonistic motivations. They also more often mention the importance of gaining independence from a temporary mobility.
The analysis then focuses on non-mobile young adults and the reasons for their non- mobility. The concept of motility (the potential for mobility) is used to capture the different dimensions of non-mobility, by classifying the barriers through three components: access ("being able" to leave), skills ("knowing" how to leave) and appropriation ("wanting" to leave). Four groups of young adults are identified, with different motility. The first group of young people face many constraints regarding their mobility, driven by their social class. The second group is strongly interested in mobility but faces a lack of financial resources. The third group values its local anchorage and its social ties, while the fourth group chooses non-mobility, with no particular constraints. The analysis allows us to classify these four groups on a continuum between 'stuckness' (unable to move) and 'stillness' (no desire to move).
These four articles of the thesis provide a broad view of young adults' temporary mobility and offer new theoretical perspectives and policy implications. The encouragement of this type of stay involves the reduction of temporal or financial barriers of access and the support of young adults with limited mobility capital. A first experience of temporary mobility generally leads the way for another one. Finally, while encouraging the reduction of access barriers, it is important to take into account the non-mobile part of the population that does not want to become mobile. From a theoretical point of view, the importance of the mobility capital and the influence of gender concerning the selectivity of temporary mobility and the motivations offer possibilities for further research. Comparative studies could confirm the empirical contributions of this thesis in different contexts (such as non-plurilingual countries or less globalised economies).
Create date
30/11/2021 10:15
Last modification date
23/12/2021 8:59