Dans le présent article, nous proposons d’interroger les expériences paysagères que vivent les pratiquants de ski de randonnée qui fréquentent divers massifs alpins. Nous montrerons que, pour ces skieurs, faire paysage peut être envisagé sur plusieurs modes. Tout d’abord, sur le mode de la lecture paysagère en faisant appel à différents registres de connaissances, de l’imaginaire des récits d’aventure aux savoirs nivologique et topographique. Puis, sur le mode de l’inscription de traces dans la neige par la pratique de ski. Nous questionnons ainsi ce que ces sillons esquissés dans le manteau nival par des corps propulsés et instrumentés par des skis traduisent d’une certaine relation contemporaine entre corps et paysage. C’est donc une pratique qui engage une pluralité d’expériences paysagères qui sera explorée via une anthropologie attentive aux logiques d’incorporation comme à l’expression écologique des corps. L’expérience paysagère qui en découle mettra à l’épreuve une définition visiocentrée du paysage pour appréhender ce dernier comme contingent de la perception humaine et surtout des relations qui se nouent et se matérialisent entre les existants (animaux, végétaux, éléments abiotiques). Loin d’une contemplation passive où la seule vision prédomine, « faire une belle ou une bonne trace » engage les pratiquants dans leur corporéité tout entière. En définitive, cette pratique nous invite à interroger conjointement un apprentissage des manières de ressentir et d’agir avec l’environnement et une forme de composition créative de paysages élémentaires.