Introduction
Le harcèlement (bullying) touche entre 5 et 10% des enfants et adolescents. Ce phénomène peut engendrer de nombreuses conséquences négatives tant dans le domaine du psychique, somatique ou social (p.ex. la qualité de vie ou l’estime de soi). Le harcèlement scolaire possède également des impacts positifs notamment sur les capacités de l’enfant à faire face à l’adversité (coping). Certaines caractéristiques physiques ou comportementales (p.ex : timidité) peuvent augmenter le risque d’être victimes de harcèlement. Cela pourrait être le cas des enfants avec une particularité physique, tels que ceux nés avec un angiome plan. Le but de cette étude est de quantifier la prévalence de harcèlement scolaire chez des enfants nés avec un angiome plan, de connaître les conséquences que ce harcèlement peut engendrer chez ces enfants et d’étudier la qualité de vie, l’estime de soi ainsi que le type de stratégie de coping utilisé au quotidien chez ces enfants. Cette étude nous permettra également de mettre en perspective le point de vue des enfants nés avec un angiome plan avec celui de leur parent sur l’ensemble de notre sujet.
Met́hode
Nous avons recruté des enfants/adolescents (11 à 16 ans) nés avec un angiome plan localisé sur le visage ou les mains. Ces enfants et l’un des parents ont rempli cinq questionnaires évaluant les caractéristiques sociodémographiques, le harcèlement subi par les autres enfants (Olweus Bully/Victim questionnaire ré visé (rBVQ)), les stratégies de coping (Cognitive Emotion Regulation Questionnaire (CERQ)), la qualité de vie (Kidscreen-27) et l’estime de soi corporelle (Body Self-Esteem (BSE)). Ces mêmes questionnaires ont été donnés à des enfants du même âge (11 à 16 ans) nés sans angiome et à l’un des parents (groupes « contrôles »). Nous avons également comparé les résultats des parents et des enfants nés avec un angiome plan afin d’avoir la perspective des parents sur l’ensemble des questionnaires étudiés.
Reśultats
Deux groupes d’enfants ont été constitués : 18 enfants nés avec un angiome plan et 18 enfants nés sans angiome. La prévalence de harcèlement subi chez les enfants nés avec un angiome plan (27,77%) est similaire au groupe contrôle (27,77%). La qualité de vie des deux groupes d’enfants est globalement similaire sauf au niveau du sous-score : « bien-être physique » avec une qualité de vie inférieure chez les enfants avec un angiome plan. Des différences significatives entre les parents et leur enfant né avec un angiome plan sont retrouvées dans les sous-scores du bien-être psychologique, de l’autonomie et du support social. En ce qui concerne les stratégies de coping du CERQ, les enfants nés avec un angiome plan ont plus souvent recours à des stratégies de coping que la population d’enfants nés sans angiome plan, avec une prédominance pour une stratégie adaptative. Au niveau de l’estime de soi, on constate que celle-ci est meilleure chez les enfants nés avec un angiome plan que le groupe contrôle avec une différence significative au niveau du sous-item concernant le regard des autres.
Conclusion
Malgré un nombre restreint d’enfants analysés, les résultats de notre étude sont plutôt rassurants pour les enfants nés avec un angiome plan. Ces enfants ont statistiquement une meilleure estime de soi que la population tout venant. Leur qualité de vie et le taux de prévalence de harcèlement scolaire subi sont globalement équivalents à la population contrôle sélectionnée. Ils ont plus souvent recours à des stratégies de coping et utilisent de meilleures stratégies que les enfants « contrôles ». Ce dernier résultat peut être expliqué par un plus grand nombre de difficultés émotionnelles auxquels ces enfants ont dû faire face dans le contexte de leur différence physique par rapport au groupe « contrôle ». L’ensemble de ces résultats nous conforte dans l’idée que des enfants nés avec un angiome plan du visage et des mains, suivis et traités à la consultation du CHUV, semblent avoir une vie équilibrée et semblable à la population « tout-venant ».