Introduction : Les personnes atteintes d’un trouble bipolaire ont souvent une évolution défavorable avec un risque élevé de rémission incomplète et de récidives ainsi qu’un fonctionnement déficient et un risque suicidaire élevé. Par conséquent, une prise en charge adéquate est nécessaire. Le but de ce travail est d’avoir une perspective de la prise en charge pharmacothérapeutique et psychothérapeutique des personnes atteintes d’un trouble bipolaire de type I ou II dans la population générale de Lausanne. Au vu de la complexité diagnostique et thérapeutique, ce travail est une ébauche de cette problématique et ouvre la porte à d’autres études plus approfondies.
Méthode : Les données utilisées proviennent de l’étude CoLaus/PsyCoLaus et sont tirées exclusivement du deuxième suivi psychiatrique (2014-2018), soit 3 666 participant.e.s faisant partie du deuxième suivi. La version française de la « Diagnostic Interview for Genetic Studies » (DIGS) est utilisée dans la partie PsyCoLaus afin de collecter des informations à propos des troubles psychiatriques. Dans ce travail, seules les données des personnes atteintes d’un trouble BP-I et BP-II récoltées sur les 5 dernières années de façon rétrospective sont analysées (n=77, BP-I : n=39 ; BP-II : n=38). Les recommandations les plus récentes, « Canadian Network for Mood and Anxiety Treatments (CANMAT) and International Society for Bipolar Disorders (ISBD) 2018 guidelines for the management of patients with bipolar disorder », sont utilisées comme référence pour l’évaluation de l’adéquation des prises en charge dans notre échantillon.
Résultats : 74,4 % des participant.e.s atteint.e.s d’un trouble BP-I ont reçu l’aide d’un.e spécialiste et 57,9 % atteint.e.s d’un trouble BP-II. 41,0 % des participant.e.s ayant un trouble BP-I ont bénéficié d’un traitement psychotrope avec psychothérapie, 18,0 % sont traité.e.s uniquement par psychothérapie et 10,3 % ont reçu uniquement une pharmacothérapie. Parmi les participant.e.s avec un trouble BP-II, seul.e.s 21,0 % ont bénéficié de psychothérapie et de pharmacothérapie, 21,1 % de psychothérapie uniquement et 13,3 % sont traité.e.s par pharmacothérapie uniquement. Ensuite, les stabilisateurs de l’humeur sont pris lors de dépression (7,7 %) et d’hypomanie (20,0 %) chez les participant.e.s souffrant d’un trouble BP-I et lors d’hypomanie (14,3 %) chez celles et ceux souffrant d’un trouble BP-II. Seul.e.s 7,7 % des participant.e.s avec un trouble BP-I en phase dépressive, 25,0 % en phase maniaque et 20,0 % en phase hypomaniaque ont reçu un antipsychotique contre aucun.e participant.e avec un trouble BP-II. Enfin, des antidépresseurs sont pris assez fréquemment pendant des épisodes maniaques et hypomaniaques lors d’un trouble BP-I.
Conclusion : Dans ce travail, certains points attirent notre attention. Premièrement, près de trois quarts des personnes atteintes d’un trouble BP-I et presque 60 % des personnes atteintes d’un trouble BP-II reçoivent une aide professionnelle. La plupart des participant.e.s sont traité.e.s par des psychotropes avec psychothérapie. Mais malgré le fait que la pharmacothérapie est au centre de la prise en charge selon les recommandations, de nombreux.ses participant.e.s ayant reçu un traitement bénéficient uniquement d’une psychothérapie. Certains aspects de la prise en charge correspondent aux recommandations tels que l’utilisation des psychothérapies individuelles. Cependant, il reste certains points à améliorer. En effet, les antidépresseurs sont largement pris lors d’épisodes maniaque ou hypomaniaque pour un trouble BP-I. Les stabilisateurs de l’humeur et les antipsychotiques sont moins pris lors d’épisodes maniaques ou hypomaniaques dans les deux groupes de participant.e.s.