À partir d'une enquête ethnographique (2017-2019) dans des établissements scolaires du secondaire II en France et en Suisse romande, cette thèse porte sur la réception et les usages des théories du complot par des élèves adolescents (15-18 ans). Avec une approche compréhensive, elle apporte un éclairage sur la diversité de leurs représentations et pratiques en s'inscrivant dans deux champs théoriques : l'étude des théories du complot et la socioanthropologie de l 'adolescence. Les théories du complot sont souvent réduites à des modes de pensées ou de croyances irrationnels ou un signe d'embrigadement politique ou religieux aussi bien par les médias, les politiques publiques que par certains chercheurs. Afin de se distancier des approches normatives et réductrices du phénomène, cette thèse s'intéresse à l'éclectisme et à la polysémie des« théories du complot» en circulation sur le Web et dans l'industrie du divertisse­ ment auxquels les élèves sont quotidiennement confrontés (humour, fictions, clips, jeux vidéo, marketing, etc.). Son but est entre autres d'éclairer les usages ludiques des théories du complot, mais également le rapport des élèves à la pensée critique. Il s'agit aussi d'évaluer comment cet intérêt pour les théories du complot pourrait constituer un levier didactique dans des enseignements de sciences humaines et sociales.
--
Based on an ethnographie survey (2017-2019) in secondary schools in France and in the French-speaking part of Switzerland, this thesis focuses on the reception and uses of conspiracy theories by adolescent students (15-18 years old). With a comprehensive approach, it sheds light on the diversity of their representations and practices by drawing on two theoretical fields: the study of conspiracy theories and the socio-anthropology of adolescence. Conspiracy theories are often reduced to a mode of thought or irrational beliefs or a sign of political or religious recruitment by the media, public policies and certain researchers. In order to distance itself from normative and reductive approaches to the phenomenon, this thesis focuses on the eclecticism and polysemy of the "conspiracy theories" circulating on the Web and in the entertainment industry with which students are confronted on a daily basis (humor, fiction, music videos, video games, marketing, etc.). Its goal is to shed light on the playful uses of conspiracy theories, but also on the students' relationship to critical thinking. It also aims to evaluate how this interest in conspiracy theories could be a didactic lever in the teaching of humanities and social sciences.