Contexte
Bien que les difficultés émotionnelles soient parmi les principaux déficits des personnes souffrant d'anorexie mentale (AN), les connaissances sur le fonctionnement émotionnel Spécifique sont encore lacunaires. Par conséquent, cette étude utilise une approche intégrative pour examiner les compétences émotionnelles des adolescents et des jeunes adultes souffrant d'AN par rapport à des sujets contrôle sains (HC).
Méthodes
Nous avons comparé les compétences émotionnelles de 32 femmes, âgées de 14 à 35 ans, avec une AN aiguë avec celles de 45 femmes témoins en bonne santé (HC). En particulier, nous avons examiné l'alexithymie (c'est-à­ dire la prise de conscience et l'identification de leurs propres émotions) à l'aide du TAS-20, la capacité d'identifier les émotions de base d'autrui exprimées dynamiquement à l'aide d'une tâche de morphing informatisée, la capacité d'identifier des émotions complexes à l'aide du Reading the Mind in the Eyes task et neuf stratégies différentes de régulation des émotions cognitives (ER) à l'aide du CERQ.
Résultats
Les participants atteints d'AN présentaient des niveaux plus élevés d'alexithymie. Les deux groupes étaient capables de reconnaître les émotions basiques et complexes chez autrui ; cependant, les participants atteints d'AN ont montré une sensibilité plus élevée pour identifier la colère, le dégoût, la tristesse et la surprise chez autrui. De plus, les participants atteints d'AN ont signalé l'utilisation de stratégies d'ER spécifiques par rapport aux HC (c'est­ à-dire « l'acceptation » et la « rumination » plus que les stratégies d'ER de « recentrage positif»,
«catastrophisme» et« accuser les autres»).
Conclusion
Les déficits du fonctionnement émotionnel (par exemple, l'identification et la régulation des émotions) jouent un rôle central dans l'émergence et le maintien de l'anorexie mentale (AN). Notre étude montre que les adolescents et les jeunes adultes atteints d'AN ont des difficultés à comprendre leur état émotionnel interne, ce qui est appelé alexithymie. En revanche, ils présentent une sensibilité plus élevée aux émotions des autres. Ces résultats semblent être cohérents avec le « moi émotionnel perdu » observé chez les personnes atteintes d'AN, qui est décrit comme des c,fifficultés à naviguer dans le monde sans un conducteur émotionnel pour les guider (c'est-à-dire qu'elles sont constamment et de plus en plus dépendantes et sensibles au regard et commentaires d'autrui). De plus, nous avons observé un modèle distinct de stratégies de régulation des émotions cognitives (ER) entre les individus avec AN et les HC, mais n'avons pas identifié de déficits généraux. Globalement, notre étude montre l'importance de considérer les différentes dimensions du (dys)fonctionnement émotionnel chez les personnes atteintes d'AN lors de l'examen et du choix des stratégies thérapeutiques. En particulier, le traitement devrait augmenter leur conscience de leurs propres émotions et renforcer les stratégies d'ER cognitives adaptatives.