Alors que dans le champ de la critique génétique, la notion de « scénario » est parfois mobilisée pour qualifier une étape précoce de l’élaboration de l’œuvre, le même terme en est venu dans le milieu du cinéma et dans le domaine des études cinématographiques à désigner, au fil d’une évolution esquissée ici à grands traits et en s’imposant comme l’acception dominante, à signifier une rédaction aboutie, voire définitive. La présente étude vise toutefois, par-delà ces différences, à opérer un rapprochement entre le « scénarique » étudié à propos de textes romanesques et certains stades liminaires de la phase d’écriture au cinéma, en particulier celle qui est fréquemment qualifiée de « séquencier ». La discussion menée ici concernant les définitions données aux différents stades de la genèse filmique (et plus précisément scénaristique) repose sur une comparaison avec la littérature consacrée au scénarique, ainsi que sur deux études de cas fort différents qi exploitent deux fonds de la Cinémathèque suisse : d’une part les archives du film En cas de malheur (1958) issues du « Fonds Claude Autant-Lara », adaptation de Simenon conçue par les principaux représentants de la Qualité française, d’autre part le film Dans la ville blanche (1983), « film d’auteur » que le réalisateur-scénariste-producteur suisse Alain Tanner a présenté en de nombreuses occasions comme ayant été tourné « sans scénario ». L’observation de différences de statut entre ces documents nous permet de dégager quelques spécificités d’étapes scripturales de la genèse filmique parente du scénario d’un roman, et de les envisager dans leur diversité.