Observer, caractériser et comprendre la pénurie en eau : une approche institutionnaliste de l'évolution du mode d'usage de l'eau en Espagne et au Maroc
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ID Serval
serval:BIB_C531D96C2C4C
Type
Thèse: thèse de doctorat.
Collection
Publications
Institution
Titre
Observer, caractériser et comprendre la pénurie en eau : une approche institutionnaliste de l'évolution du mode d'usage de l'eau en Espagne et au Maroc
Directeur⸱rice⸱s
Criqui P.
Détails de l'institution
Université de Grenoble
Statut éditorial
Acceptée
Date de publication
2012
Langue
français
Nombre de pages
532 + 90
Notes
Thèse en deux volumes : mémoire de thèse et annexes
Résumé
Ce mémoire de thèse a pour objet la pénurie en eau. Il a pour point de départ le postulat que la pénurie n'est pas un phénomène technique uniquement lié à l'insuffisance d'eau mais un phénomène avant tout social organisé par des normes d'usage. Aussi, face aux analyses techniques a-historiques centrées sur la rareté physique de l'eau, nous développons une problématique sociale-contingente pour laquelle les usages de l'eau sont au coeur de l'explication.
Cette recherche est structurée selon un mode de production du savoir particulier qui comprend trois étapes et qui articule deux composantes : une composante empirique et une composante théorique-formelle. Le découpage du mémoire de thèse en deux parties respecte cette articulation.
La première partie correspond à l'étape d'observation. Elle a pour objectif de retracer l'évolution du mode d'usage de l'eau à Almeria (Andalousie) et à Marrakech et Agadir (Maroc) entre la fin du XIXe siècle et aujourd'hui. Considéré comme domaine d'observation, le mode d'usage de l'eau (ARRUS) qualifie l'articulation d'un volet "économique", relatif à l'ajustement réciproque de l'offre et des usages finals de l'eau produite (formalisé par des normes techniques qualifiées de normes-procédures) et d'un volet "institutionnel", relatif aux normes sociales (qualifiées de normes-règles) présidant à la définition des droits de disposition sur les ressources en eau. Pour chacun des trois terrains, cette étape comprend une étude de terrain qualitative (entretiens exploratoires et entretiens semi directifs) combinée à une analyse historiographique et à une analyse textuelle de documents de planification selon la méthode Alceste. Cette étape débouche sur la formulation de quatre faits stylisés chronologiques traduisant la succession de quatre phases constitutives du cycle de vie d'un mode d'usage de l'eau particulier. Ces quatre faits stylisés communs à l'Espagne et au Maroc formalisent le matériau analysé dans la deuxième partie. Ils constituent un résultat intermédiaire.
La deuxième partie est d'ordre théorique. Elle correspond aux étapes de caractérisation et de compréhension. Ces deux étapes reposent sur la mobilisation d'une grille théorique nouvelle élaborée par BILLAUDOT sur la base d'une mise en rapport de l'institutionnalisme de COMMONS et de l'institutionnalisme sociologique de l'approche interprétative de l'économie des conventions (BOLTANSKI et THÉVENOT). En postulant que cette double appropriation critique n'est possible que dans un cadre régulationniste, l'approche en institutionnalisme historique et pragmatique mobilisée se présente comme une perspective d'approfondissement de l'institutionnalisme historique de la théorie de la régulation. Cette approche a pour objectif d'articuler genèse et fonction des institutions et conduit notamment à associer à chacune des modalités polaires de règlement des transactions de Commons une valeur de référence et un bien supérieur visé.
Ainsi, le mode d'usage de l'eau particulier ayant connu une phase de régime en Espagne et au Maroc au cours de la seconde moitié du XXe siècle est qualifié d'"hydrauliciste". Il se caractérise par une représentation de l'eau essentiellement comme ressource d'allocation, dont l'abondance obtenue par des infrastructures à haute intensité de génie civil constitue une des prérogatives de l'État "moderne" qui, en aval, régit également son usage. D'un point de vue théorique, la valeur "collectif-nation" associée à la "planification" et la valeur "efficacité technique instrumentale" associée à la "direction" sont prédominantes dans le processus d'institutionnalisation des normes-règles qui composent ce mode d'usage.
L'identification des principales caractéristiques du mode d'usage "hydrauliciste" permet d'aboutir à la troisième étape, à savoir la compréhension des déterminants de son entrée en crise à partir des années 1980. D'une part, cette crise porte sur l'arrivée à terme des régularités antérieures quant à l'ajustement réciproque de l'offre et des usages finals de l'eau produite : on constate une raréfaction des ressources primaires (grâce à une nouvelle typologie des crises, on qualifie cet aspect de "crise de la régulation"). D'autre part, elle correspond à la remise en question du cadre institutionnel qui soutient le volet économique (on constate une "crise du fondement du régime"). Ainsi, les normes sont partiellement disqualifiées par un double processus de délocalisation en faveur d'une décentralisation de la gestion de l'eau. D'un point de vue théorique, cela se traduit notamment par un effacement de la valeur "collectif-nation", en faveur de la valeur "liberté- compétition" associée au "marchandage". De plus, le caractère non soutenable du mode d'usage antérieur conduit à l'émergence d'aspirations écologistes concrétisées par la proposition de nouvelles normes d'usage. Le registre de socialisation écologique pour lequel l'eau est comprise comme un milieu de vie se renforce.
Au final, après avoir théoriquement défini la pénurie en eau comme le résultat de l'échec du mode d'usage de l'eau "hydrauliciste", nous aboutissons à l'identification d'un nouveau mode d'usage de l'eau actuellement en vigueur. Nous montrons que, s'il se propose de répondre aux limites du précédent, en l'état, ce nouveau mode d'usage ne procède pas d'une rupture paradigmatique mais correspond à un "régime de crise".
Cette recherche est structurée selon un mode de production du savoir particulier qui comprend trois étapes et qui articule deux composantes : une composante empirique et une composante théorique-formelle. Le découpage du mémoire de thèse en deux parties respecte cette articulation.
La première partie correspond à l'étape d'observation. Elle a pour objectif de retracer l'évolution du mode d'usage de l'eau à Almeria (Andalousie) et à Marrakech et Agadir (Maroc) entre la fin du XIXe siècle et aujourd'hui. Considéré comme domaine d'observation, le mode d'usage de l'eau (ARRUS) qualifie l'articulation d'un volet "économique", relatif à l'ajustement réciproque de l'offre et des usages finals de l'eau produite (formalisé par des normes techniques qualifiées de normes-procédures) et d'un volet "institutionnel", relatif aux normes sociales (qualifiées de normes-règles) présidant à la définition des droits de disposition sur les ressources en eau. Pour chacun des trois terrains, cette étape comprend une étude de terrain qualitative (entretiens exploratoires et entretiens semi directifs) combinée à une analyse historiographique et à une analyse textuelle de documents de planification selon la méthode Alceste. Cette étape débouche sur la formulation de quatre faits stylisés chronologiques traduisant la succession de quatre phases constitutives du cycle de vie d'un mode d'usage de l'eau particulier. Ces quatre faits stylisés communs à l'Espagne et au Maroc formalisent le matériau analysé dans la deuxième partie. Ils constituent un résultat intermédiaire.
La deuxième partie est d'ordre théorique. Elle correspond aux étapes de caractérisation et de compréhension. Ces deux étapes reposent sur la mobilisation d'une grille théorique nouvelle élaborée par BILLAUDOT sur la base d'une mise en rapport de l'institutionnalisme de COMMONS et de l'institutionnalisme sociologique de l'approche interprétative de l'économie des conventions (BOLTANSKI et THÉVENOT). En postulant que cette double appropriation critique n'est possible que dans un cadre régulationniste, l'approche en institutionnalisme historique et pragmatique mobilisée se présente comme une perspective d'approfondissement de l'institutionnalisme historique de la théorie de la régulation. Cette approche a pour objectif d'articuler genèse et fonction des institutions et conduit notamment à associer à chacune des modalités polaires de règlement des transactions de Commons une valeur de référence et un bien supérieur visé.
Ainsi, le mode d'usage de l'eau particulier ayant connu une phase de régime en Espagne et au Maroc au cours de la seconde moitié du XXe siècle est qualifié d'"hydrauliciste". Il se caractérise par une représentation de l'eau essentiellement comme ressource d'allocation, dont l'abondance obtenue par des infrastructures à haute intensité de génie civil constitue une des prérogatives de l'État "moderne" qui, en aval, régit également son usage. D'un point de vue théorique, la valeur "collectif-nation" associée à la "planification" et la valeur "efficacité technique instrumentale" associée à la "direction" sont prédominantes dans le processus d'institutionnalisation des normes-règles qui composent ce mode d'usage.
L'identification des principales caractéristiques du mode d'usage "hydrauliciste" permet d'aboutir à la troisième étape, à savoir la compréhension des déterminants de son entrée en crise à partir des années 1980. D'une part, cette crise porte sur l'arrivée à terme des régularités antérieures quant à l'ajustement réciproque de l'offre et des usages finals de l'eau produite : on constate une raréfaction des ressources primaires (grâce à une nouvelle typologie des crises, on qualifie cet aspect de "crise de la régulation"). D'autre part, elle correspond à la remise en question du cadre institutionnel qui soutient le volet économique (on constate une "crise du fondement du régime"). Ainsi, les normes sont partiellement disqualifiées par un double processus de délocalisation en faveur d'une décentralisation de la gestion de l'eau. D'un point de vue théorique, cela se traduit notamment par un effacement de la valeur "collectif-nation", en faveur de la valeur "liberté- compétition" associée au "marchandage". De plus, le caractère non soutenable du mode d'usage antérieur conduit à l'émergence d'aspirations écologistes concrétisées par la proposition de nouvelles normes d'usage. Le registre de socialisation écologique pour lequel l'eau est comprise comme un milieu de vie se renforce.
Au final, après avoir théoriquement défini la pénurie en eau comme le résultat de l'échec du mode d'usage de l'eau "hydrauliciste", nous aboutissons à l'identification d'un nouveau mode d'usage de l'eau actuellement en vigueur. Nous montrons que, s'il se propose de répondre aux limites du précédent, en l'état, ce nouveau mode d'usage ne procède pas d'une rupture paradigmatique mais correspond à un "régime de crise".
Mots-clé
Eau, Pénurie, Normes, Justification, Institutionnalisme historique, Institutionnalisme sociologique
Création de la notice
20/08/2013 8:37
Dernière modification de la notice
20/08/2019 15:40