as Exequaturverfahren im Anwendungsbereich des Lugano-Übereinkommens vom 30. Oktober 2007 aus schweizerischer Sicht
Détails
ID Serval
serval:BIB_A570C32A78A8
Type
Thèse: thèse de doctorat.
Collection
Publications
Institution
Titre
as Exequaturverfahren im Anwendungsbereich des Lugano-Übereinkommens vom 30. Oktober 2007 aus schweizerischer Sicht
Directeur⸱rice⸱s
Peter Hansjörg
Détails de l'institution
Université de Lausanne, Faculté de droit, des sciences criminelles et d'administration publique
Statut éditorial
Acceptée
Date de publication
2020
Langue
allemand
Résumé
Avant qu’un titre étranger (soit une décision, un acte authentique ou une transaction judiciaire) puisse être exécuté en Suisse, il faut qu’un tribunal interne le déclare exécutoire. Dans ce but, les art. 38 ss CL – directement applicables – énoncent les principes d’une procédure particulière. Il revient au droit interne de couvrir les lacunes : en Suisse, il s’agit notamment des dispositions concernant la procédure sommaire (art. 335 ss CPC, art. 252 ss CPC), celles du recours cantonal (art. 319 ss CPC) et celles du recours au Tribunal fédéral (art. 90 ss LTF).
La Convention de Lugano veut permettre au créancier d’exécuter son titre rapidement et facilement. Ceci conduit à ce que la procédure devant la première instance soit spéciale en deux points. Premièrement, la procédure est unilatérale (le débiteur ne peut pas s’exprimer) ; secondement, le tribunal n’examine que les formalités (art. 41 CL) : en principe, il suffit de produire une expédition de la décision et un certificat délivré par l’autorité étrangère compétente. À ce stade, il est interdit au juge de considérer les motifs de refus (art. 34 s. CL), même si ceux-ci sont présents de manière évidente dans le cas d’espèce. Le pouvoir d’examen se limite aux conditions de recevabilité, à l’applicabilité de la Convention de Lugano, à la légitimation active et passive et à la force exécutoire. La doctrine n’est pas unanime sur la question de savoir si le mémoire préventif est admissible ou non. Selon l’art. 41 CL, la partie contre laquelle l’exécution est demandée ne peut, à ce stade de la procédure, présenter d’observations. Par définition, le mémoire préventif est déposé par anticipation d’une procédure (art. 270 al. 1 CPC). Puisque l’art. 41 CL ne règle pas la situation avant la litispendance, il doit être licite d’en fournir un ; mais le juge ne peut vérifier les arguments invoqués que dans la mesure où il dispose d’un pouvoir d’examen. Selon la version allemande de l’art. 41 CL, le tribunal doit décider immédiatement (dans la version française cet adverbe manque). En Suisse, les premières instances statuent normalement en quelques jours.
Avec sa demande d’exequatur (ou durant la procédure), le créancier peut solliciter des mesures conservatoires (art. 47 al. 2 CL). Si la créance a pour objet une somme d’argent ou des sûretés, il s’agira du séquestre (art. 271 al. 1 ch. 6 LP) ; dans les autres cas, les mesures provisionnelles de l’art. 262 CPC seront pertinentes. Dans la mesure du possible, le tribunal statuera en une seule décision sur la demande d’exequatur et celle de mesures conservatoires.
Ce n’est que devant la deuxième instance qu’on accorde au débiteur le droit d’être entendu (art. 43 al. 3 CL). L’art. 43 CL tend à équilibrer les désavantages subis par la partie adverse en première instance : le débiteur a un délai d’un ou de deux mois pour former un recours (art. 43 al. 5 CL). En outre, le pouvoir d’examen du tribunal de recours est plus large que celui du tribunal de première instance (ce qui est unique en droit de procédure civile suisse) : même si l’art. 45 al. 1 CL ne se réfère qu’aux art. 34 s. CL (les motifs de refus), il est largement admis que l’autorité de recours peut aussi examiner librement toutes les questions de fait et de droit que la première instance pouvait déjà prendre en compte (sinon, le droit d’être entendu ne serait pas respecté). Reste controversée la question de savoir si le débiteur peut faire valoir des exceptions et des objections matérielles (comme par exemple l’objection de compensation). Il devrait être capable de le faire pour autant que son argument conduise à ce que le titre ne soit plus exécutoire dans l’état d’origine (art. 38 al. 1 CL). La juridiction saisie du recours prévu à l’art. 43 CL statue à bref délai (art. 45 al. 1 CL) ; en Suisse, la procédure de recours peut durer normalement jusqu’à six mois.
S’agissant de la contestation du séquestre comme mesure conservatoire selon l’art. 47 al. 2 CL, la jurisprudence et la doctrine majoritaire distinguent deux situations : si le débiteur conteste le cas de séquestre, il devra le faire par la voie du recours (art. 43 CL). En revanche, s’il invoque des griefs ayant trait à l’exécution du séquestre, il devra passer tout d’abord par la voie de l’opposition (art. 278 al. 1 LP). L’opposition et le recours ont le même but, à savoir celui de faire respecter le droit du débiteur d’être entendu. Devant la première instance, la partie adverse ne peut pas s’exprimer sur l’exequatur (donc sur le fond) ; a fortiori, il devrait en être de même pour le séquestre comme mesure conservatoire.
La décision du tribunal cantonal supérieur peut faire l’objet d’un recours au Tribunal fédéral (art. 44 CL et l’annexe IV). Il s’agit du recours en matière civile (art. 72 ss LTF), si la valeur litigieuse atteint 30'000 francs (art. 74 al. 1 lit. b LTF) ou si la contestation soulève une question juridique de principe (art. 74 al. 2 lit. a LTF). Selon l’avis majoritaire, seul le recours constitutionnel subsidiaire est possible dans les autres cas. À l’inverse du recours en matière civile où il est possible d’invoquer une violation du droit international (art. 95 lit. b LTF), les griefs à faire valoir dans le recours constitutionnel subsidiaire se limitent à la violation des droits constitutionnels (art. 116 LTF). Les dispositions de la Convention de Lugano n’en font pas partie. L’art. 45 al. 1 CL prévoit un pouvoir d’examen de la troisième instance limité aux motifs prévus aux art. 34 s. CL. L’art. 116 LTF ne remplit pas ces exigences et la Suisse n’a pas émis une réserve formelle. Par conséquent, il doit en tout cas être possible de recourir selon les art. 72 ss LTF. La troisième instance doit statuer à bref délai (art. 45 al. 1 CL) ; le Tribunal fédéral décide généralement en environ six mois.
Ayant obtenu l’exequatur, le créancier peut alors procéder à l’exécution au sens propre. Mais quel est l’objet à exécuter ? Est-ce la décision d’exequatur, le titre étranger ou bien les deux ? Le jugement d’exequatur ne s’exprime pas sur la prestation, il n’est donc pas exécutoire. Le titre lui-même est exécutoire dans son pays d’origine, mais pas en Suisse (raison pour laquelle l’exequatur est nécessaire). Ce sont donc les deux qui forment l’objet de l’exécution : le titre étranger se prononce sur la prestation à exécuter et la décision d’exequatur permet de le faire.
Avant que la Convention de Lugano de 1988 ne soit entrée en vigueur, la Suisse ne connaissait pas de procédure particulière pour l’exequatur des décisions étrangères condamnant à une prestation pécuniaire ou à la fourniture de sûretés. Le juge de la mainlevée statuait sur ces questions à titre préjudiciel (c’est-à-dire dans les considérants mais pas dans le dispositif). Les art. 31 ss aCL prévoyaient la procédure d’exequatur qui se retrouve aujourd’hui dans les art. 38 ss CL. Selon l’art. 32 al. 1 lit. a aCL, la requête était présentée au juge de la mainlevée dans le cadre de la procédure régie par les art. 80 s. LP. On voyait que la mainlevée était incompatible avec le traité. Dès lors, deux courants opposés se sont développés. Selon le premier, le créancier ne pouvait obtenir l’exequatur que dans la procédure de mainlevée. Selon l’autre avis, la partie intéressée pouvait choisir entre la mainlevée et la procédure particulière selon les art. 31 ss aCL. En 2008, le Tribunal fédéral s’est explicitement rallié à la seconde opinion.
Le 1er janvier 2011, la Convention de Lugano révisée est entrée en vigueur en Suisse. L’art. 32 aCL est devenu l’art. 39 CL. Son al. 1 se réfère à l’annexe II selon laquelle est compétent le tribunal cantonal de l’exécution. La procédure de mainlevée n’y est plus mentionnée. Selon l’avis majoritaire (y compris le message du Conseil fédéral et la jurisprudence du Tribunal fédéral et des tribunaux cantonaux), le créancier continue à avoir le choix entre la procédure particulière (réglée par les art. 38 ss CL) et la mainlevée. Une minorité de la doctrine exclut cependant la voie du droit interne.
Si un cas d’espèce entre dans le champ d’application de la Convention de Lugano, il faut – au sens propre du terme – l’appliquer. Le traité international prime sur le droit national, ce qui vaut aussi pour la Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (art. 30a LP). La Convention de Lugano ne prévoit aucune exception ; la Suisse ne s’est pas formellement réservée le droit de ne pas appliquer les art. 38 ss CL dans certaines situations (notamment lorsque le créancier opte pour la voie interne). La Convention de Lugano vise à instaurer une procédure rapide afin d’assurer l’exécution des titres étrangers. On peut donc argumenter que la Convention de Lugano permettrait des procédures alternatives à condition qu’elles soient plus favorables et qu’elles respectent les standards minimaux du traité. La Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite prévoit deux possibilités pour obtenir un exequatur : si le débiteur ne s’oppose pas au commandement de payer, celui-ci devient l’objet d’exécution ; un exequatur formel n’est dès lors plus nécessaire (c’est-à-dire le commandement de payer remplace la décision d’exequatur). En cas d’opposition, le créancier doit requérir la mainlevée définitive et le juge statue à titre préjudiciel sur la force exécutoire (art. 81 al. 3 LP) ; sa décision a l’effet d’un jugement d’exequatur. La procédure de poursuite venant d’être présentée mène plus vite à l’exécution au sens propre (saisie ou faillite) que la procédure selon les art. 38 ss CL sur laquelle une poursuite s’aligne. Les art. 67 ss LP semblent donc plus favorables que les dispositions du traité international. Mais respectent-ils aussi les exigences minimales de la convention ? Vu que le créancier peut y renoncer, ce sont les garanties en faveur du débiteur qui restent à examiner.
Il est possible d’adapter la mainlevée aux standards conventionnels : la première instance doit être capable d’appliquer l’art. 46 al. 3 CL ; elle doit assurer que le débiteur a un ou deux mois pour préparer sa défense ; elle doit respecter les exigences de la signification prévues à l’art. 43 al. 5 CL, quand elle cite le débiteur ou quand elle lui donne l’occasion de répondre par écrit (art. 84 al. 2 LP) ; et elle ne devra statuer sur l’émolument selon l’art. 48 OELP que si les frais dans la procédure d’exequatur étaient plus élevés que ceux de la mainlevée. Le tribunal cantonal supérieur peut demander une garantie selon l’art. 46 al. 3 CL ; lorsque le titre étranger n’est plus exécutoire, c’est un novum à observer ; l’émolument ne se déterminera selon l’art. 48 OELP et l’art. 61 al. 1 OELP que s’il est plus bas que celui dans la procédure de recours de l’art. 43 CL. La Convention de Lugano influence même le recours au Tribunal fédéral : il ne lui est pas permis de vérifier l’exequatur préjudiciel sur demande du créancier sauf si ce dernier fait valoir une violation de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; ceci découle du fait que le débiteur n’est pas tenu de se défendre plus que deux fois selon la Convention de Lugano. En outre, la troisième instance est tenue de vérifier si le titre étranger est encore exécutoire.
En ce qui concerne la procédure du commandement de payer, il faut tenir compte du fait que l’office des poursuites n’examine pas si le titre est exécutoire dans le pays d’origine (voir l’art. 69 al. 1 LP). Si le débiteur ne forme pas opposition, le créancier pourra requérir l’exécution sans avoir obtenu l’exequatur. Cette possibilité viole l’art. 38 al. 1 CL qui prévoit que le titre est déclaré exécutoire avant l’exécution sans exceptions (c’est-à-dire même en cas de passivité du débiteur). De lege lata, il est impossible d’interpréter l’art. 69 al. 1 LP de manière conforme aux exigences de la Convention de Lugano. Il faut en déduire que le créancier doit en tout cas entamer la procédure d’exequatur particulière selon les art. 38 ss CL. Quelles sont les conséquences si l’on maintient le système actuel (approuvé par la jurisprudence et la majorité des auteurs) ? C’est une constellation invraisemblable qui donne la réponse : le créancier requiert l’exequatur selon les art. 38 ss CL sans fournir son titre étranger ; la première instance fait droit à sa demande sans la prouver sur le fond ; le jugement est notifié au débiteur qui ne forme pas de recours selon l’art. 43 CL. Dans ce cas, l’art. 47 al. 3 CL e contrario permet au créancier de continuer par l’exécution au sens propre. La violation de l’art. 38 al. 1 CL ne conduit donc pas à ce qu’un acte de poursuite soit nul.
Le créancier d’une dette échue et non garantie par gage peut requérir le séquestre lorsqu’il possède un titre de mainlevée contre le débiteur (art. 271 al. 1 ch. 6 LP). Si la Convention de Lugano est applicable, le tribunal statuera aussi sur l’exequatur (art. 271 al. 3 LP). Qu’est-ce à dire et quelle est la relation entre ces dispositions et l’art. 47 al. 1 et 2 CL ? L’art. 47 al. 1 CL se réfère au droit interne ; il n’implique pas d’exequatur. Selon l’art. 47 al. 2 CL, la déclaration constatant la force exécutoire emporte l’autorisation de procéder à des mesures conservatoires. Le traité différencie donc les mesures qui ont besoin d’un exequatur de celles qui ne le nécessitent pas. Les cas de séquestre selon l’art. 271 al. 1 ch. 1–5 LP impliquent que l’exécution est en péril ; ils sont donc visés par l’art. 47 al. 1 CL. La notion de titre de mainlevée se trouve dans l’art. 80 al. 1 LP : c’est un jugement exécutoire. Le titre étranger a besoin d’un exequatur pour être exécutoire en Suisse. L’art. 271 al. 1 ch. 6 LP transpose donc l’art. 47 al. 2 CL et l’art. 271 al. 3 LP reprend l’art. 41 CL.
La Convention de Lugano veut permettre au créancier d’exécuter son titre rapidement et facilement. Ceci conduit à ce que la procédure devant la première instance soit spéciale en deux points. Premièrement, la procédure est unilatérale (le débiteur ne peut pas s’exprimer) ; secondement, le tribunal n’examine que les formalités (art. 41 CL) : en principe, il suffit de produire une expédition de la décision et un certificat délivré par l’autorité étrangère compétente. À ce stade, il est interdit au juge de considérer les motifs de refus (art. 34 s. CL), même si ceux-ci sont présents de manière évidente dans le cas d’espèce. Le pouvoir d’examen se limite aux conditions de recevabilité, à l’applicabilité de la Convention de Lugano, à la légitimation active et passive et à la force exécutoire. La doctrine n’est pas unanime sur la question de savoir si le mémoire préventif est admissible ou non. Selon l’art. 41 CL, la partie contre laquelle l’exécution est demandée ne peut, à ce stade de la procédure, présenter d’observations. Par définition, le mémoire préventif est déposé par anticipation d’une procédure (art. 270 al. 1 CPC). Puisque l’art. 41 CL ne règle pas la situation avant la litispendance, il doit être licite d’en fournir un ; mais le juge ne peut vérifier les arguments invoqués que dans la mesure où il dispose d’un pouvoir d’examen. Selon la version allemande de l’art. 41 CL, le tribunal doit décider immédiatement (dans la version française cet adverbe manque). En Suisse, les premières instances statuent normalement en quelques jours.
Avec sa demande d’exequatur (ou durant la procédure), le créancier peut solliciter des mesures conservatoires (art. 47 al. 2 CL). Si la créance a pour objet une somme d’argent ou des sûretés, il s’agira du séquestre (art. 271 al. 1 ch. 6 LP) ; dans les autres cas, les mesures provisionnelles de l’art. 262 CPC seront pertinentes. Dans la mesure du possible, le tribunal statuera en une seule décision sur la demande d’exequatur et celle de mesures conservatoires.
Ce n’est que devant la deuxième instance qu’on accorde au débiteur le droit d’être entendu (art. 43 al. 3 CL). L’art. 43 CL tend à équilibrer les désavantages subis par la partie adverse en première instance : le débiteur a un délai d’un ou de deux mois pour former un recours (art. 43 al. 5 CL). En outre, le pouvoir d’examen du tribunal de recours est plus large que celui du tribunal de première instance (ce qui est unique en droit de procédure civile suisse) : même si l’art. 45 al. 1 CL ne se réfère qu’aux art. 34 s. CL (les motifs de refus), il est largement admis que l’autorité de recours peut aussi examiner librement toutes les questions de fait et de droit que la première instance pouvait déjà prendre en compte (sinon, le droit d’être entendu ne serait pas respecté). Reste controversée la question de savoir si le débiteur peut faire valoir des exceptions et des objections matérielles (comme par exemple l’objection de compensation). Il devrait être capable de le faire pour autant que son argument conduise à ce que le titre ne soit plus exécutoire dans l’état d’origine (art. 38 al. 1 CL). La juridiction saisie du recours prévu à l’art. 43 CL statue à bref délai (art. 45 al. 1 CL) ; en Suisse, la procédure de recours peut durer normalement jusqu’à six mois.
S’agissant de la contestation du séquestre comme mesure conservatoire selon l’art. 47 al. 2 CL, la jurisprudence et la doctrine majoritaire distinguent deux situations : si le débiteur conteste le cas de séquestre, il devra le faire par la voie du recours (art. 43 CL). En revanche, s’il invoque des griefs ayant trait à l’exécution du séquestre, il devra passer tout d’abord par la voie de l’opposition (art. 278 al. 1 LP). L’opposition et le recours ont le même but, à savoir celui de faire respecter le droit du débiteur d’être entendu. Devant la première instance, la partie adverse ne peut pas s’exprimer sur l’exequatur (donc sur le fond) ; a fortiori, il devrait en être de même pour le séquestre comme mesure conservatoire.
La décision du tribunal cantonal supérieur peut faire l’objet d’un recours au Tribunal fédéral (art. 44 CL et l’annexe IV). Il s’agit du recours en matière civile (art. 72 ss LTF), si la valeur litigieuse atteint 30'000 francs (art. 74 al. 1 lit. b LTF) ou si la contestation soulève une question juridique de principe (art. 74 al. 2 lit. a LTF). Selon l’avis majoritaire, seul le recours constitutionnel subsidiaire est possible dans les autres cas. À l’inverse du recours en matière civile où il est possible d’invoquer une violation du droit international (art. 95 lit. b LTF), les griefs à faire valoir dans le recours constitutionnel subsidiaire se limitent à la violation des droits constitutionnels (art. 116 LTF). Les dispositions de la Convention de Lugano n’en font pas partie. L’art. 45 al. 1 CL prévoit un pouvoir d’examen de la troisième instance limité aux motifs prévus aux art. 34 s. CL. L’art. 116 LTF ne remplit pas ces exigences et la Suisse n’a pas émis une réserve formelle. Par conséquent, il doit en tout cas être possible de recourir selon les art. 72 ss LTF. La troisième instance doit statuer à bref délai (art. 45 al. 1 CL) ; le Tribunal fédéral décide généralement en environ six mois.
Ayant obtenu l’exequatur, le créancier peut alors procéder à l’exécution au sens propre. Mais quel est l’objet à exécuter ? Est-ce la décision d’exequatur, le titre étranger ou bien les deux ? Le jugement d’exequatur ne s’exprime pas sur la prestation, il n’est donc pas exécutoire. Le titre lui-même est exécutoire dans son pays d’origine, mais pas en Suisse (raison pour laquelle l’exequatur est nécessaire). Ce sont donc les deux qui forment l’objet de l’exécution : le titre étranger se prononce sur la prestation à exécuter et la décision d’exequatur permet de le faire.
Avant que la Convention de Lugano de 1988 ne soit entrée en vigueur, la Suisse ne connaissait pas de procédure particulière pour l’exequatur des décisions étrangères condamnant à une prestation pécuniaire ou à la fourniture de sûretés. Le juge de la mainlevée statuait sur ces questions à titre préjudiciel (c’est-à-dire dans les considérants mais pas dans le dispositif). Les art. 31 ss aCL prévoyaient la procédure d’exequatur qui se retrouve aujourd’hui dans les art. 38 ss CL. Selon l’art. 32 al. 1 lit. a aCL, la requête était présentée au juge de la mainlevée dans le cadre de la procédure régie par les art. 80 s. LP. On voyait que la mainlevée était incompatible avec le traité. Dès lors, deux courants opposés se sont développés. Selon le premier, le créancier ne pouvait obtenir l’exequatur que dans la procédure de mainlevée. Selon l’autre avis, la partie intéressée pouvait choisir entre la mainlevée et la procédure particulière selon les art. 31 ss aCL. En 2008, le Tribunal fédéral s’est explicitement rallié à la seconde opinion.
Le 1er janvier 2011, la Convention de Lugano révisée est entrée en vigueur en Suisse. L’art. 32 aCL est devenu l’art. 39 CL. Son al. 1 se réfère à l’annexe II selon laquelle est compétent le tribunal cantonal de l’exécution. La procédure de mainlevée n’y est plus mentionnée. Selon l’avis majoritaire (y compris le message du Conseil fédéral et la jurisprudence du Tribunal fédéral et des tribunaux cantonaux), le créancier continue à avoir le choix entre la procédure particulière (réglée par les art. 38 ss CL) et la mainlevée. Une minorité de la doctrine exclut cependant la voie du droit interne.
Si un cas d’espèce entre dans le champ d’application de la Convention de Lugano, il faut – au sens propre du terme – l’appliquer. Le traité international prime sur le droit national, ce qui vaut aussi pour la Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (art. 30a LP). La Convention de Lugano ne prévoit aucune exception ; la Suisse ne s’est pas formellement réservée le droit de ne pas appliquer les art. 38 ss CL dans certaines situations (notamment lorsque le créancier opte pour la voie interne). La Convention de Lugano vise à instaurer une procédure rapide afin d’assurer l’exécution des titres étrangers. On peut donc argumenter que la Convention de Lugano permettrait des procédures alternatives à condition qu’elles soient plus favorables et qu’elles respectent les standards minimaux du traité. La Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite prévoit deux possibilités pour obtenir un exequatur : si le débiteur ne s’oppose pas au commandement de payer, celui-ci devient l’objet d’exécution ; un exequatur formel n’est dès lors plus nécessaire (c’est-à-dire le commandement de payer remplace la décision d’exequatur). En cas d’opposition, le créancier doit requérir la mainlevée définitive et le juge statue à titre préjudiciel sur la force exécutoire (art. 81 al. 3 LP) ; sa décision a l’effet d’un jugement d’exequatur. La procédure de poursuite venant d’être présentée mène plus vite à l’exécution au sens propre (saisie ou faillite) que la procédure selon les art. 38 ss CL sur laquelle une poursuite s’aligne. Les art. 67 ss LP semblent donc plus favorables que les dispositions du traité international. Mais respectent-ils aussi les exigences minimales de la convention ? Vu que le créancier peut y renoncer, ce sont les garanties en faveur du débiteur qui restent à examiner.
Il est possible d’adapter la mainlevée aux standards conventionnels : la première instance doit être capable d’appliquer l’art. 46 al. 3 CL ; elle doit assurer que le débiteur a un ou deux mois pour préparer sa défense ; elle doit respecter les exigences de la signification prévues à l’art. 43 al. 5 CL, quand elle cite le débiteur ou quand elle lui donne l’occasion de répondre par écrit (art. 84 al. 2 LP) ; et elle ne devra statuer sur l’émolument selon l’art. 48 OELP que si les frais dans la procédure d’exequatur étaient plus élevés que ceux de la mainlevée. Le tribunal cantonal supérieur peut demander une garantie selon l’art. 46 al. 3 CL ; lorsque le titre étranger n’est plus exécutoire, c’est un novum à observer ; l’émolument ne se déterminera selon l’art. 48 OELP et l’art. 61 al. 1 OELP que s’il est plus bas que celui dans la procédure de recours de l’art. 43 CL. La Convention de Lugano influence même le recours au Tribunal fédéral : il ne lui est pas permis de vérifier l’exequatur préjudiciel sur demande du créancier sauf si ce dernier fait valoir une violation de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; ceci découle du fait que le débiteur n’est pas tenu de se défendre plus que deux fois selon la Convention de Lugano. En outre, la troisième instance est tenue de vérifier si le titre étranger est encore exécutoire.
En ce qui concerne la procédure du commandement de payer, il faut tenir compte du fait que l’office des poursuites n’examine pas si le titre est exécutoire dans le pays d’origine (voir l’art. 69 al. 1 LP). Si le débiteur ne forme pas opposition, le créancier pourra requérir l’exécution sans avoir obtenu l’exequatur. Cette possibilité viole l’art. 38 al. 1 CL qui prévoit que le titre est déclaré exécutoire avant l’exécution sans exceptions (c’est-à-dire même en cas de passivité du débiteur). De lege lata, il est impossible d’interpréter l’art. 69 al. 1 LP de manière conforme aux exigences de la Convention de Lugano. Il faut en déduire que le créancier doit en tout cas entamer la procédure d’exequatur particulière selon les art. 38 ss CL. Quelles sont les conséquences si l’on maintient le système actuel (approuvé par la jurisprudence et la majorité des auteurs) ? C’est une constellation invraisemblable qui donne la réponse : le créancier requiert l’exequatur selon les art. 38 ss CL sans fournir son titre étranger ; la première instance fait droit à sa demande sans la prouver sur le fond ; le jugement est notifié au débiteur qui ne forme pas de recours selon l’art. 43 CL. Dans ce cas, l’art. 47 al. 3 CL e contrario permet au créancier de continuer par l’exécution au sens propre. La violation de l’art. 38 al. 1 CL ne conduit donc pas à ce qu’un acte de poursuite soit nul.
Le créancier d’une dette échue et non garantie par gage peut requérir le séquestre lorsqu’il possède un titre de mainlevée contre le débiteur (art. 271 al. 1 ch. 6 LP). Si la Convention de Lugano est applicable, le tribunal statuera aussi sur l’exequatur (art. 271 al. 3 LP). Qu’est-ce à dire et quelle est la relation entre ces dispositions et l’art. 47 al. 1 et 2 CL ? L’art. 47 al. 1 CL se réfère au droit interne ; il n’implique pas d’exequatur. Selon l’art. 47 al. 2 CL, la déclaration constatant la force exécutoire emporte l’autorisation de procéder à des mesures conservatoires. Le traité différencie donc les mesures qui ont besoin d’un exequatur de celles qui ne le nécessitent pas. Les cas de séquestre selon l’art. 271 al. 1 ch. 1–5 LP impliquent que l’exécution est en péril ; ils sont donc visés par l’art. 47 al. 1 CL. La notion de titre de mainlevée se trouve dans l’art. 80 al. 1 LP : c’est un jugement exécutoire. Le titre étranger a besoin d’un exequatur pour être exécutoire en Suisse. L’art. 271 al. 1 ch. 6 LP transpose donc l’art. 47 al. 2 CL et l’art. 271 al. 3 LP reprend l’art. 41 CL.
Création de la notice
18/02/2021 11:50
Dernière modification de la notice
19/02/2021 6:25