Ce travail de maitrise a été pour moi l’occasion de pouvoir aborder la médecine différemment
de ce que j’ai pu faire pendant mes six années d’études. En effet, la pratique médicale ne peut
être comprise sans étudier la manière dont elle se construit et la société dans laquelle elle
évolue. C’est pour cette raison que j’ai décidé de faire un travail en histoire de la médecine.
Le sujet de la contraception m’a toujours intéressée. En effet, elle touche de nombreux
domaines comme la médecine, la démographie et questionne les rapports au genre et à la
sexualité. C’est aujourd’hui une pratique que l’on associe naturellement à la médecine alors
que ce n’est que récemment que les médecins s’y sont intéressés1.
Sensible aux questions touchant à la santé des femmes, à la médicalisation de leur vie et plus
largement au féminisme, l’histoire de la contraception et plus précisément celle de la pilule
contraceptive à travers les mouvements féministes, m’intéresse tout particulièrement.
Les débats autour de la pilule contraceptive reviennent d’ailleurs souvent dans notre actualité
et il me semblerait qu’aujourd’hui il y ait une certaine désaffection envers la pilule. C’est en
tout cas l’impression que m’ont donnée les nombreux articles de journaux et reportages
télévisés parlant des dangers de la pilule2, ainsi que mes nombreuses amies ayant renoncé à la
pilule pour revenir à des méthodes de contraception plus naturelles. Mais cette désaffection
est-elle nouvelle ? Comment la pilule contraceptive a-t-elle été accueillie dans la société
suisse lors de sa mise sur le marché ?
J’ai donc décidé d’aborder le sujet de l’arrivée de la pilule en Suisse romande et me suis
particulièrement intéressée à la manière dont ce médicament est devenu un objet de lutte
symbolique des mouvements féministes des années 1970. Ces féministes avaient fait de la lutte pour la démocratisation de la contraception un de leurs principaux combats. Mais
qu’avaient-elles réellement énoncé sur la pilule contraceptive ?
Au fur et à mesure de mes recherches sur les mouvements féministes suisses des années 70,
j’ai découvert que l’un des mouvements qui avait le plus fait parler de lui à l’époque en Suisse
romande était le MLF (Mouvement de Libération des Femmes) de Genève. Leur fonds
d’archives à Genève va constituer le matériel de base de mon travail.
L’objet du présent travail consistera en l’étude des discours, et l’analyse des arguments du
MLF sur les bienfaits ou les méfaits de la pilule contraceptive. En particulier, j’exposerai
comment, dans son discours, le MLF-Genève a mis en lien la pilule contraceptive avec les
thèmes de la libération sexuelle, du pouvoir médical et du pouvoir politique.