Abstract
Contexte
Les cauchemars sont des rêves effrayants qui sont fréquemment suivis de réveils. Ils impliquent souvent un rappel précis du rêve et sont associés à des composantes émotionnelles telles que la peur, la colère et le dégoût. Alors que la plupart des individus présentent occasionnellement des cauchemars sans conséquences majeures, certaines personnes souffrent de cauchemars répétés et subissent au quotidien les conséquences d'un sommeil altéré. La prévalence dans la population suisse et la physiopathologie de cette affection demeurent méconnues. Peu d'études à large échelle ont été effectuées à ce sujet.
Objectifs
Le premier objectif de ce travail est de déterminer la prévalence des cauchemars dans la population adulte lausannoise. Le second objectif est de déterminer les caractéristiques cliniques et polysomnographiques des sujets atteints de cauchemars fréquents. Le but est de pouvoir analyser la macro architecture du sommeil des personnes présentant des cauchemars.
Méthodes
Les sujets investigués sont des adultes faisant partie de la base de données récoltées dans le cadre de l'étude HypnoLaus(1). La fréquence des cauchemars a été évaluée sur la base du questionnaire des parasomnies de Münich (« à quelle fréquence faites-vous des rêves effrayants et des cauchemars ? ». 4491 personnes ont répondu et ont été sélectionnées. A l’aide de T-tests non appariés et de tests de U-Mann Whitney, nous avons étudié les différences cliniques entre un groupe cas (n = 123) et un groupe contrôle (n = 2931). Concernant, l’étude des caractéristiques polysomnographiques, nous avons sélectionné un sous-groupe de 51 participants correspondant au groupe « cas » (cauchemars au moins 1x/semaine et ayant eu une polysomnographie) et les avons comparé à l’aide de T-test appariés à 255 contrôles moyennant 5 contrôles correspondant à chaque cas, en fonction de l’âge (plus ou moins 2 ans) et du sexe. Une ANOVA séparant les participants en trois groupes en fonction de la fréquence des cauchemars nous a permis d’analyser plus finement les différences de certaines variables.
Résultats
La prévalence des cauchemars (au moins une fois par semaine) dans la population lausannoise est de 2.7%. Les sujets souffrants de cauchemars qualifient leur sommeil de moins bon par rapport au groupe contrôle et sont plus somnolents (score d’Epworth supérieur au groupe contrôle). Ils souffrent de plusieurs autres comportements nocturnes (parasomnies) et consomment plus de médicaments tels que somnifères, antidépresseurs et neuroleptiques. Concernant l’architecture du sommeil, nous constatons que les personnes avec cauchemars fréquents ont un temps de réveil intra-sommeil plus élevé par rapport aux personnes faisant moins de cauchemars. Nous ne trouvons pas d’association entre genre et quantité de cauchemars.
Conclusion
Les cauchemars fréquents (au moins une fois par semaine) est un trouble relativement fréquent dans la population lausannoise. Nous constatons que cette condition s’associe à une réduction de la qualité subjective du sommeil et s’accompagne de plaintes diurnes. Malgré ces différences subjectives, la macrostructure du sommeil évaluée par polysomnographie est similaire entre les sujets atteins de cauchemars et le groupe contrôle. D’autres analyses s’intéressant à la micro-architecture et à l’analyse spectrale par EEG seraient nécessaires pour éclaircir la pathogénèse de cette affection.