Introduction : Notre société connaît actuellement un vieillissement marqué de la population. En parallèle à cela, internet prend une place croissante dans les pratiques quotidiennes de la plupart des personnes, ce qui modifie le rapport de nombreux utilisateurs aux informations de santé, devenues accessibles en quantité bien plus importante. Pour les personnes âgées, le recours à internet pour la recherche d’informations de santé apparaît susceptible d’être en- travé par des difficultés particulières tant au niveau de l’apprentissage que de l’utilisation. Ce travail s’intéresse au rapport des aînés à internet et plus particulièrement au contexte dans lequel ils recourent – ou au contraire cessent de recourir – à internet pour y chercher des informations de santé.
Objectifs :
- Dégager une meilleure connaissance de l’utilisation d’internet par les aînés pour leur santé - Définir une typologie des facteurs de leur engagement et désengagement numérique
- Recueillir des informations à propos de l’incidence clinique, chez les personnes âgés, du recours et du non-recours à internet pour la santé
- Dégager une typologie d’utilisateurs âgés d’internet (du point de vue de la santé)
Méthode : Ces objectifs sont réalisés dans le cadre d’une enquête qualitative. Des entretiens individuels semi-directifs ont été effectués auprès de personnes âgées de 65 ans ou plus de Suisse romande. Nous avons inclus 10 seniors dans l’étude.
Résultats: La quasi-totalité des personnes interviewées se rendait sur internet pour des rai- sons liées à la santé au moment de l’étude ou avait effectué des recherches de ce type par le passé. L’acquisition des compétences nécessaires à l’utilisation d’ordinateurs apparaît impor- tante pour les seniors, qui ont montré une certaine fierté de leur littératie numérique. Les re- cherches effectuées sur internet modifient le rapport d’une partie des seniors à la santé. Inter- net semble surtout servir aux aînés de source d’information d’appoint face à d’autres sources plus importantes – leurs médecins traitants en premier lieu – et parfois aussi comme un moyen de faire des économies en contractant des assurances maladie gérées en ligne.
De plus, les seniors font souvent état d’interactions avec leurs proches au sujet de leurs re- cherches à propos de la santé sur internet. Ils ne reçoivent pas seulement des conseils relatifs à des sites traitant de la santé, mais il leur arrive également d’en donner à leur entourage. Par ailleurs, les proches semblent également mettre les ainés en garde à propos de recherches perçues comme étant à risque de susciter de l’anxiété et/ou de la désinformation. Le rôle des médecins face à l’utilisation d’internet par les seniors en quête d’informations de santé semble plutôt marginal. Leur fonction tient principalement à recevoir les récits de recherches sur inter- net et à les valider le cas échéant. Parfois ils mettent également en garde contre la qualité variable des contenus trouvés en ligne, mais ne conseillent pas activement de sites internet qu’ils jugeraient plus fiables.
Parmi les causes conduisant certains seniors actifs sur la toile à cesser de s’y rendre alors même qu’ils en auraient encore les capacités et l’envie, on peut signaler le déménagement dans un logement privé ou institutionnel n’offrant pas la possibilité de se connecter.
Conclusion: Cette étude qualitative révèle l’intérêt d'approfondir encore les connaissances disponibles sur la littératie numérique des personnes âgées et notamment par rapport à leur consultation d’internet pour des questions de santé. Dans l’ensemble, le recours des seniors interrogés à internet apparaît profitable du point de vue de leur santé et ne pas générer d’an- xiété inutile. Les cliniciens gagneraient sans doute à aborder d’avantage le sujet d’internet avec leurs patients ainés intéressés.