Par l’examen des représentations photographiques et cinématographiques de Serge Lifar, et de leur diffusion, le présent article vise à éclairer certains ressorts visuels de la fascination exercée par le danseur, de ses débuts aux Ballets russes en 1923 jusqu’à la fin de son activité à l’Opéra de Paris en 1958. En mettant en scène sa carnation et sa musculature, ces images construisent un canon corporel à la fois inaccessible et profondément ancré dans son époque, performatif dans la durée grâce à sa diffusion dans les médias, dont l’essor est alors considérable. Le modèle représenté par Serge Lifar, situé par rapport à d’autres corps canoniques de son temps, tire son efficacité d’une perpétuelle négociation entre l’incarnation de fantasmes d’un ailleurs exotique et celle d’un idéal de la modernité blanche et désirable inspirée de l’antique. // Through an examination of the representations of Serge Lifar in photography and film and their subsequent dissemination, this study seeks to bring out some of the visual sources of the fascination exercised by the dancer from his debut at the Ballets Russes in 1923 to the end of his career at the Paris Opera in 1958. By emphasizing his skin colour and muscularity, these images created a physical canon that was at once inaccessible and profoundly rooted in his era, but also endowed with a lasting performative dimension through the growing role of the media. Relative to other bodily canons of Lifar’s time, the model he represented drew its effectiveness from a continual negotiation between the fantasies of an exotic elsewhere and the ideal of a desirable white modernity inspired by Antiquity.