La résistance aux antibiotiques, directement corrélée à la consommation des antimicrobiens, fait l’objet de préoccupations croissantes notamment dans le secteur hospitalier. Cette problématique est responsable d’une augmentation de morbidité, mortalité, des durées de séjour et des coûts. Parallèlement, dans bien des cas, les patients restent hospitalisés pour la durée complète de leur traitement antibiotique les exposant à un risque majoré d’infections nosocomiales. Promouvoir un usage prudent et rationnel des antibiotiques constitue un enjeu majeur de santé publique.
Si grâce à des organes de surveillance nationaux tels que le programme anresis.ch nous disposons en Suisse de données quant à la quantité d’antibiotiques prescrits à l’échelle d’un hôpital ou d’un service, nous n’avons en revanche que très peu d’informations sur la qualité de nos prescriptions antibiotiques à l’échelle du patient et sur la possibilité de prises en charge ambulatoires plus précoces.
Nous avons ainsi cherché à décrire les possibilités d'optimisation des prescriptions antibiotiques à l'hôpital universitaire de Lausanne et à évaluer la pertinence d'un retour à domicile précoce parmi les patients recevant des antibactériens. Durant cette enquête, le besoin en structures ambulatoires intermédiaires, permettant d’assurer une suite de prise en charge infectiologique prompte après le retour à domicile, a également été évalué.
Nous avons mené une enquête de prévalence ponctuelle des prescriptions antibiotiques et de l’éligibilité à un retour à domicile précoce dans les services somatiques aigus adultes, à l'exclusion des unités de soins intermédiaires et intensifs. Tous les patients hospitalisés recevant un antibiotique systémique le jour de l'évaluation ont été inclus.
Au total, 564 dossiers de patients ont été examinés. 182 (32%) patients recevaient un ou plusieurs antibiotiques par voie systémique : 62 (34%) sous forme de prophylaxie seule et 120 (66%) sous forme de traitement avec ou sans prophylaxie concomitante. 37/62 (60%) des patients recevant une prophylaxie n'avaient pas d'indication pour continuer l'antibactérien. Concernant les patients traités par antibiotiques, 69/120 (58%) présentaient au moins une opportunité d'optimisation de leur antibiothérapie, principalement des interruptions. Une consultation antérieure du service des maladies infectieuses était enregistrée pour 55/120 (46%) patients, dont 21 (38%) auraient pu bénéficier d'une optimisation de l'antibiothérapie le jour de l'évaluation ponctuelle. 9,2% des patients étaient éligibles pour un retour à domicile le jour de l’audit, dont 64% sous condition d’un suivi infectiologique ambulatoire étroit.
Cette étude de prévalence ponctuelle offre de précieux indicateurs pour orienter des interventions futures d’encadrement des prescriptions pouvant être associées à un plan de sortie précoce. Tout centre envisageant de mettre en œuvre des programmes d’antibiotic stewardship devrait, à notre sens, mener ce type d'analyse selon une approche pragmatique, afin d’évaluer les pratiques locales et identifier les ressources nécessaires.