L'une des principales causes de morbidité et de mortalité en chirurgie cardiaque pédiatrique est la défaillance myocardique postopératoire secondaire à l'ischémie myocardique peropératoire. La mise en place d'une cardioprotection adéquate est intimement liée à la compréhension des facteurs conduisant à une ischémie du fait de la mauvaise préservation de certaines zones de myocarde pendant la chirurgie.
Le but de ce travail est de déterminer s'il existe une corrélation entre l'évolution postopératoire et le volume de solution de cardioplégie administré au cours de la circulation extracorporelle (CEC) indexé à la masse ventriculaire gauche mesurée à l'échocardiographie ainsi qu'au poids de l'enfant ou de sa surface corporelle.
Il s'agit d'une étude rétrospective observationnelle effectuée au Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV) à Lausanne, centre d'enseignement tertiaire, de janvier 2017 à décembre 2018. Elle inclut 136 patients pédiatriques âgés entre 0 et 16 ans, ayant bénéficié d'une chirurgie correctrice ou de palliation pour des anomalies cardiaques congénitales, sous CEC.
La masse ventriculaire gauche est mesurée par échocardiographie. Afin de normaliser les résultats au vu d'une population pédiatrique, le volume de cardioplégie est rapporté au nombre de grammes de myocarde au poids ou à la surface corporelle, puis au temps de clampage aortique. Ces volumes indexés sont mis en relation avec les données périopératoires afin d'évaluer de manière indirecte la
qualité de la cardioplégie.
Les résultats montrent que les patients qui ont reçu moins de volume de solution de cardioplégie par gramme de myocarde (indexé au poids ou à la surface corporelle), présentent à 24h postopératoire un score d'amine plus élevé et une durée de la ventilation mécanique prolongée. En ajustant le volume de solution de cardioplégie à la durée du clampage aortique, le groupe recevant un volume inférieur à 2.14 ml de solution de cardioplégie indexée au poids et au temps ont des signes indirects d'un débit cardiaque inférieur et les durées de ventilation mécanique et de séjour aux soins intensifs sont prolongées.
En conclusion, notre étude démontre qu'avec un volume inférieur à 2.14 ml de solution de cardioplégie par gramme de myocarde et par minute de clampage aortique, l'évolution postopératoire est défavorable avec la présence de signes indirects d'un débit cardiaque inférieur au groupe contrôle et ainsi qu'un séjour aux soins intensifs prolongé. L'intégration de la masse myocardique dans la stratégie de cardioprotection permet de réduire d'incidence de bas débit en postopératoire et des complications qui en découlent.