Les pratiques d’excision, consistant en des modifications corporelles profondément ancrées dans des traditions sociales et culturelles, continuent de susciter des débats intenses sur les plans médical, éthique et politique. Cette recherche, ancrée dans le champ de la psychologie de la santé, explore ces pratiques à travers une approche critique et décolonisante, en s’intéressant à la manière dont elles sont pensées, vécues et discutées dans des contextes suisses et égyptiens. Elle mobilise une analyse discursive critique afin d’étudier la manière dont des femmes excisées et des professionnel·le·s de santé donnent du sens à ces pratiques à travers des discours socioculturels dominants tels que les discours biomédicaux, postféministes et postcoloniaux. En s’intéressant à la manière dont ces discours façonnent les récits, les expériences identitaires et les positionnements des sujets, cette recherche questionne également les normes hégémoniques et les dynamiques de pouvoir qui sous-tendent ces discours. S’appuyant sur des données qualitatives recueillies lors d’entretiens individuels et de groupe, ainsi que d’observations ethnographiques, cette recherche démontre la façon dont ces discours dominants construisent les excisions, notamment les conflits identitaires et les injonctions normatives qu’ils génèrent. Les contradictions au sein des discours médicaux, postféministes et postcoloniaux contemporains sont ainsi mises en lumière, soulignant des tensions entre la pathologisation des excisions, la revendication de certains impératifs sur les corps et sexualités des femmes ainsi que la reproduction de normes globales sur le genre et la santé. En examinant les récits d’appropriation et de résistance de ces discours par des femmes excisées et des soignant·e·s, ce travail propose une lecture critique et intersectionnelle qui déconstruit les stéréotypes associés « à la femme excisée » et aux communautés de pratique. Enfin, cette recherche plaide pour une approche inclusive, respectueuse des subjectivités et des savoirs locaux, tout en interrogeant les implications éthiques et politiques des discours globaux sur le genre, le corps, la sexualité et la santé.